BAGDAD (AFP) - Près de 80 Irakiens ont péri jeudi, la plupart dans des attentats suicide dans Kerbala la chiite et Ramadi la sunnite, poussant des responsables à évoquer une campagne de terreur liée aux élections.
Dans la plus sanglante de ces attaques, un kamikaze a détonné ses explosifs au milieu de la foule dans la ville de Kerbala, à 110 km au sud de Bagdad, pas loin du mausolée de l'imam Hussein, lieu de pèlerinage chiite.
"Nous avons recensé 44 morts et 52 blessés, mais le bilan risque de s'alourdir car plusieurs blessés ont été hospitalisés dans un état grave", a déclaré le chef de la police de la ville, le colonel Abdel Razzak al-Thai. "Un kamikaze portant une ceinture de plus de 7 kg d'explosifs et plusieurs grenades s'est fait exploser à 10H15 (07H15 GMT) près d'un groupe de pèlerins, à quelques mètres d'une des entrées du mausolée de l'imam Hussein", a-t-il dit.
Il s'agit du deuxième attentat suicide antichiite après celui de mercredi commis lors de funérailles chiites dans la ville de Moqdadiyah, au nord de Bagdad, où 37 personnes ont péri.
Retransmission télévisée de l'attentat qui a fait 40 morts le 5 janvier 2006 à Kerbala
©AFP/Al-Iraqiya/TVPresque au même moment, un autre attentat suicide a visé un centre de recrutement de la police à Ramadi, bastion rebelle sunnite à 110 km à l'ouest de Bagdad. "Trente personnes ont été tuées et 41 blessées", selon une source de sécurité à Bagdad, qui a laissé aussi entendre que ce bilan pourrait augmenter. "Un kamikaze portant une veste remplie d'explosifs s'est fait exploser à 10H55 près d'une usine de céramique où était installé un centre de recrutement", a indiqué auparavant l'armée américaine, sans fournir de bilan. Plus de 1.000 candidats, âgés de 20 à 35 ans, attendaient devant le centre, selon elle.
Dans une troisième attaque, quatre policiers ont été tués par des tirs près de Baaqouba, à 60 km au nord-est de Bagdad. Trois voitures piégées, dont deux conduites par des kamikazes, ont explosé à Bagdad, selon des sources de sécurité qui n'ont pas précisé de bilan.
L'entourage du Premier ministre chiite Ibrahim Jaafari a dénoncé une campagne de terreur liée aux législatives du 15 décembre. Cette élection a été remportée par les chiites conservateurs, selon des résultats partiels contestés par des partis sunnites et la liste de l'ex-Premier ministre, le chiite laïc Iyad Allaoui.
Jalal Talabani et Ibrahim Jaafari le 2 janvier 2006 à Souleimanyah
©AFP/Archives - Mohammed Shwan"C'est un nouveau crime odieux qui s'ajoute à ceux des criminels et montre leur sauvagerie et confessionnalisme", a déclaré Jawad al-Maliki, numéro deux du parti Dawa de M. Jaafari, en parlant de l'attaque de Kerbala. Il a dénoncé les fidèles de l'ancien régime qui "cherchent à faire pression pour réinstaller dans le pays le parti Baas révolu". "Certains ont dit que les résultats ne passeront pas sans séisme", a-t-il dit, en référence aux déclarations d'hommes politiques contestant les résultats.
"Ils cherchent par la pression terroriste à changer ces résultats", a dit M. Maliki. Le président Jalal Talabani a dénoncé la flambée de violences mais affirmé qu'elle n'empêcherait pas le pays de se consacrer à "la formation d'un gouvernement d'union nationale". Pour le porte-parole des contestataires des résultats des législatives, Ali Tamimi, "il importe de dénoncer avec la même force le terrorisme et les fraudes".
Les résultats définitifs du scrutin doivent être publiés d'ici quatre jours, a indiqué un responsable de la commission électorale, Hussein al-Hindaoui. Et selon lui, la composition exacte et nominative du Parlement devrait être connue d'ici le 20 janvier. Mais des groupes politiques ont rejeté cette annonce et exigé au préalable la fin de l'enquête sur des plaintes de fraudes par une délégation d'experts internationaux.
Enfin, la télévision Al-Arabiya a diffusé une vidéo du Jordanien Mahmoud Salmane Saïdat, retenu en otage en Irak depuis le 20 décembre. Il a appelé le roi Abdallah II à intervenir pour lui sauver la vie et l'échanger contre une Irakienne détenue en Jordanie et accusée d'implication dans les sanglants attentats d'Amman en novembre.