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 Voix off : enquête sur un imaginaire sonore hyper codé

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AuteurMessage
MALIKA
Invité




Voix off : enquête sur un imaginaire sonore hyper codé Empty
MessageSujet: Voix off : enquête sur un imaginaire sonore hyper codé   Voix off : enquête sur un imaginaire sonore hyper codé EmptyVen 9 Avr - 20:54

Elles « habillent » la télé, rendent une pub radio irritante, une bande-annonce fantastique ou un documentaire caricatural. Ces voix familières qui s'imposent quotidiennement à nos oreilles colportent les plus gros stéréotypes sonores.

D'où sort la voix d'homme supposément poivre et sel qui parviendrait presque à nous faire croire que le café noir,c'est sombre et sexy ? Qui a inventé le ton « Capital » ? Et qui accuser de tous ces clichés ? Enquête sur le métier de « voix » qui baigne dans le doux conservatisme du marketing.

Ah, ce timbre grave, un peu rugueux, si viril…
Depuis notre tendre enfance cathodique, des voix pré-enregistrées ont éduqué nos oreilles aux codes d'un imaginaire sonore collectif. Dans le panthéon acoustique, qui pourra varier selon les recoins du PAF que vous fréquentez le plus, quelques personnages-voix sont des poncifs :

L'homme supposément poivre et sel, ce timbre grave, un peu rugueux, convoqué pour tout message à caractère sensationnel. Les pubs pour cafés/chocolats/parfums/voitures l'ont trouvé classe et se le sont approprié :

On le retrouverait presque dans la voix d'homme des émissions de télé-réalité qui résume ce qui s'est passé la semaine précédente et qui, dans les jeux télévisés, assure les transitions ou annonce son lot de consolation à Simone qui vient de perdre : il troque alors l'ultra-grave contre un timbre plus joueur et accessible.

« Qui veut gagner des millions » terminé, l'homme du PAF reprend déjà son ton émoustillant, teasing oblige, pour annoncer le téléfilm du soir.

La maman « sympa et sexy » pour le lait en poudre

Excédé, vous zappez. Vous tombez alors sur la maman « sympa et sexy ». Pour tout ce qui a trait à l'enfance, la famille ou les produits pour nous les femmes, le PAF utilise cette voix souriante, capable d'évoquer alternativement l'éclate à la récré…

Hors PAF, cette tonalité maternelle vous guidera dans les gares, montrera encore sa bienveillance avec son familier « Assurez-vous de ne rien avoir oublié dans le train » et, empruntant une tonalité plus ironique, reviendra dans le taxi sur FIP vous annoncer les embouteillages. Retrouvez-la, avec un ton plus institutionnel -mais toujours un peu sexy- dans les aéroports…
Ces cools qui veulent réveiller le tigre qui est en toi n'ont pas peur de trop en faire, tout comme leurs petits frères et soeurs qui prennent un ton idoine pour parler poney et fraises.


Puis il y a ce petit personnage surexcité des pubs radio. Record de débit pour ce déjanté au ton hard-selling, qui a sa place dans la catégorie des voix les plus artificielles que la com » ait inventées, responsables de l'agressivité que votre poste dégage quand viennent les insupportables pubs.


Et enfin, tarte à la crème du PAF sonore, vient le/la journaliste. Son débit posé, marqué de silences à suspens, vendra le sujet du reportage en l'habillant de mystère « sous forme de thriller », a dit Télérama.

Mystère autour de ce fait divers sur le reportage de France 3, mystère autour du pouvoir caché des Francs-Maçons sur Capital, mystère de la nature pour les documentaires animaliers de France 5.

Mention spéciale pour les doublages de témoignages

« Moi, ça fait 25 ans que je suis dans ton inconscient »

L'impression lassante de toujours entendre les mêmes voix et de flotter dans un monde sonore stéréotypé méritait enquête.

Pierre-Alain de Garrigues, « voix » de métier, m'explique :

« Quand tu étais petite, je faisais la voix de ton dessin animé mais aussi celle de la pub de céréales d'avant et l'annonce du téléfilm d'après. Depuis ce temps, j'ai du faire… allez, disons, 30 000 enregistrements ! »

Il fait partie de ces quelques dizaines de professionnels à l'origine de la grande majorité des voix qui arrivent quotidiennement à nos tympans.

Ils sont peu nombreux : si Casting Machine, site qui répertorie ces professionnels, compte 300 inscrits, « disons qu'il y en a une cinquantaine qui en vit, une trentaine qui en vit très bien et dix stars qui font la majorité des enregistrements », estime Pierre-Alain de Garrigues.

« C'est différent pour le doublage cinéma », précise Patrick Kuban, qui fait depuis neuf ans les annonces de Canal + et RTL2. « Le doublage ciné est un métier à part, même si quelques comédiens font des allers-retours. »

« Je n'aurais pas la même voix pour FIP ou pour la SNCF »

Pour le reste, pub et « habillage » télé et radio, vous entendrez souvent :

Julie Bataille sur TF1 et France 3 et dans quantités de pubs
François Berland, grande voix off des jeux télévisés
Thierry Debrune, voix d'Un dîner presque parfait, de Star Academy ou de Super Nanny
Anne Ferrier, voix de France Info
Frédérique Labussière, madame « Respirez, vous êtes sur FIP », notamment voix de Fructis et Perle de Lait, etc.
« Il est néanmoins étrange que vous ayez cette impression d'entendre toujours les mêmes voix partout, ces voix sont justement très versatiles », note Simone Hérault, ancienne animatrice sur la radio musicale parisienne FIP et célèbrissime voix de la SNCF.

Elle précise que ce n'est pas la tessiture qui est familière, à moins d'avoir une très bonne oreille, mais peut-être le jeu -souriant, promo, punchy, excité, sombre, amical- qu'empruntent les « voix » : « Moi, je n'aurai pas la même “voix” si on me demande de parler sur FIP ou pour la SNCF. »

Aux origines : com », pub et voix-caméléons
Pour comprendre d'où viennent ces clichés, il faut remonter aux années 80, quand la pub, notamment aidée par l'ouverture des radios privées, s'est révélée sensible à l'usage marketing que l'on pouvait faire du son.

Elles ont aussi connu l'arrivée de ce que Culture Pub appellera les voix « caméléon ». Pierre-Alain de Garrigues raconte :

« Tout à coup, au début des années 80, huit, neuf, dix personnes, comme une génération spontanée, sont apparues.

Elles étaient capables de tout faire : annoncer avec un ton d'hôtesse de l'air un programme radio comme beugler le prix du kilo de veau cette semaine en supermarché, le tout en dix secondes pile.

La pub s'en est emparé et pendant longtemps, sur dix pubs qu'on entendait à la télé ou à la radio, presque toutes étaient faites par ces quelques voix-là, qui ont inventé des styles et placé la barre très haut. »


Est-ce là la date d'invention de ces quelques personnages-voix qui habitent notre inconscient sonore ? Jean-Claude Ponroy, réalisateur au studio de production de Radio France Publicité, explique :

« En partie, oui. Philippe Murgier, Jean-François Devaux et les quelques grandes stars du début et du milieu des années 1980 avaient posé les premiers jalons de la palette sonore, mais on leur demandait moins d'être polyvalents. Cette palette s'est considérablement enrichie avec ces voix-caméléons.

Attention cependant : ces voix inventées viennent davantage d'une demande de plus en plus sophistiquée de la part des publicitaires que de ces comédiens qui n'ont pas une grande marge de manoeuvre. »


Puis, « cette première génération, qui enregistre encore aujourd'hui, a fait des petits clones qui ont imités les voix qu'ils entendaient depuis tout petits », confie Pierre-Alain de Garrigues.

Répéter les clichés : enjeux marketing et logo sonores
Fidèle à son penchant pour la reproduction des clichés, la pub a (re)construit ce monde imaginaire où les hommes annoncent les informations techniques ou sévères tandis que les femmes s'adressent aux femmes, accompagnent les enfants ou parfois, deviennent sexy.

L'idée : caricaturer la voix de la cible visée si bien que la voix pour un produit pour enfant touchera des aigüs particulièrement stridents. « C'est la pub qui nous choisit ! », explique Patrick Kuban :

« Notre difficulté à nous, c'est de ne pas tomber dans la caricature. Si on peut parfois proposer des choses nouvelles en studio, on reste face à un annonceur et une agence de pub avec, sous nos yeux, un conducteur. »


Chaque chaîne, chaque marque, chaque pub a trouvé sa coloration, en s'identifiant au groupe de référence de la population qu'elle vise, et une fois établi, ce logo sonore qui fait la force du message en fait aussi tout son conservatisme.

Il faut créer de la familiarité : « La voix de la SNCF, c'est quasiment une entité ; elle vit sa vie presque sans moi ! Et elle contribue au capital sympathie de la marque », explique Simone Hérault, dont la voix, inscrite dans la charte sonore de la SNCF, est actuellement synthétisée pour l'expérimentation.

« On est moins obligé de crier dans le micro »

« Il y a aura toujours du hard-selling et des voix extrêmement travaillées, choisies selon le format, la cible et le message », explique Philippe Bessoussan de Studio Time, société qui a développé Casting Machine.

Si changement il y a, il viendra de la volonté de certaines marques de se différencier : la voix d'Arte, inattendue, aux notes enfantines dictées par Sylvie Caspar, avait un peu décomplexé ce monde dénué d'irrégularités.

« Mais c'est très conservateur. Depuis que j'ai commencé, je n'ai pas vu apparaître beaucoup de nouvelles voix », remarque Patrick Kuban. Interrogé sur le devenir du pire versant du métier, les pubs radio irritantes qui véhiculent les plus gros clichés, il note aussi :

« Avec l'amélioration des techniques de captation et de diffusion, on est moins obligé de crier dans le micro. L'évolution de la technique joue un rôle. »


Tout comme le format : « Dans la pub radio, il n'y a pas de soutien de l'image, la parodie est donc la loi du genre », explique Pierre-Alain de Garrigues, partenaire de Daniel Prévost pour ces pubs pour U ! U ! U ! Les nouveaux commerçants.

Les « écoles de voix » fournissent des « voix low cost »

Et la voix de synthèse ? Patrick Kuban, Pierre-Alain de Garrigues et leurs homologues, qui fondent en ce moment l'association Les Voix pour faire connaître leur métier, n'y voient pas une menace.

Eux regrettent davantage l'arrivée des voix low-cost, à une heure où les écoles de voix se multiplient et promettent que votre voix vaut de l'or contre des stages coûteux.

Alors à quand le retour du naturel ? Patrick Kuban et Pierre-Alain de Garrigues répondent :

« On le constate un peu, notamment sur M6, bizarrement… Si un annonceur se met à vouloir une voix “naturelle”, on pourra bien le faire. »


Tous les sons viennent du site Casting Machine et des sites professionnels des comédiens cités.


http://www.rue89.com/2010/04/09/voix-off-enquete-sur-un-imaginaire-sonore-hyper-codes-146772
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